Exposition « Bulles d’Antiquité : le monde romain dans la BD ».

Jusqu’au 28 août 2012, le Forum antique de Bavay, musée archéologique du département du Nord, présente une exposition consacrée au monde romain dans la BD : « Bulles d’Antiquité ». Nous présentons l’exposition et le catalogue qui en est issu.

Une initiation à la bande dessinée historique

L’Antiquité, l’antiquité romaine et égyptienne en particulier, est un sujet prisé des auteurs de BD. L’exposition présentée au musée de Bavay jusqu’au 28 août 2012 témoigne de la richesse de ce sujet dans le neuvième art et se veut une initiation à la bande dessinée historique à travers plusieurs auteurs et personnages phares : Jacques Martin (« Alix »), Albert Uderzo et René Goscinny (« Astérix »), Laurent Sieurac et Alain Genot (série « Arelate »), Jean Dufaux et Philippe Delaby (Série « Murena ») et les oeuvres de Gilles Chaillet.

Les sources de la BD historique sont nombreuses et bien représentées dans l’exposition : l’influence de la peinture historique, des péplums, de l’imagerie du XIX^e siècle (on pense au Costume historique d’Auguste Racinet déjà présenté dans Insula), des manuels scolaires du XX^e siècle, mais également des trouvailles et des résultats de la recherche archéologique : les bandes dessinées vont jusqu’à être complétées de notes de bas de page, selon le procédé des publications savantes, et deviennent des outils pédagogiques.

Le parti pris de l’exposition est de présenter quelques bandes dessinées et de les comparer entre-elles sur des sujets ciblés, illustrés de planches, d’albums, mais encore d’objets archéologiques. Ces derniers sont certes peu nombreux, mais sont de très belle facture. Ainsi, pour illustrer le monde de l’armée, évidemment présent, les légionnaires dessinés par Uderzo voisinent un très beau casque datant de la Conquête en provenance de Besançon, ou encore des diplômes militaires très bien conservés.

La gladiature a une place de choix dans l’imaginaire. S’inspirant du tableau Pollice Verso (« Le pouce renversé ») peint en 1872 par Jean-Léon Gérôme, on retrouve les personnages de bande dessinée saluant l’empereur dans sa loge. La visite au Colisée s’impose : même Astérix visite le fameux amphithéâtre, plus de cent ans avant sa construction ! L’exposition présente un très rare casque de gladiateur provenant de Pompéi.

Le dialogue entre le discours archéologique et les usages de la fiction est fructueux. Une vitrine présente ainsi un couteau à lame pliante provenant d’Arles : une planche de la série « Arelate » évoque ce couteau et sa fin dans le caniveau des thermes où les archéologues l’ont retrouvé.

L’exposition ne vise évidemment pas à l’exhaustivité. Volontairement, il manque des auteurs ou des séries de bd. De nombreux sujets relatifs à l’antiquité romaine sont également absents des cimaises de l’exposition qui, bien entendu, ne pouvait illustrer l’ensemble de la société romaine. Il n’empêche : si le Colisée est bien représenté, on l’a vu, le quartier de Tibure a ainsi été soigneusement évité. Et si le banquet gaulois n’a pas été oublié – Astérix oblige – n’est pas abordé le thème si prisé des banquets romains. On pourrait regretter, par exemple, l’absence de la bd réalisée par Manara, lequel a si merveilleusement dessiné Rome dans une ambiance fellinienne pour son illustration de L’Âne d’or d’Apulée.

Didactique, l’exposition laisse une grande place aux explications. Elle permet de confronter images et objets, choix des auteurs de fiction et connaissances archéologiques, licence poétique et souci du détail réaliste (l’exposition s’achève sur la présentation du travail titanesque de Gilles Chaillet dans sa reconstitution dessinée du plan de Rome). Dans la présentation, le texte prime souvent sur l’image, ce qui peut être perçu comme le désir de nous faire (re)plonger dans ces « classiques » de la bande dessinée.

Le catalogue « Bulles d’Antiquité »

Le catalogue synthétise et complète de manière remarquablement illustrée le propos de l’exposition. Il s’ouvre sur un très bel hommage à Gilles Chaillet, décédé en septembre 2011, à qui Véronique Beirnaert-Mary, directrice du Forum antique de Bavay, dédie l’exposition et le catalogue. L’archéologue Jean-Pierre Adam propose un chapitre sur « B.D. et Antiquité, la tentation de la pédagogie » ; l’historien Michel Thiébaut consacre un chapitre à « l’Antiquité en bande dessinée dans quelques publications de 1945 à la fin des années 70 » ; Eric Teyssier, Maître de conférences en histoire romaine à l’université de Nîmes traite de la gladiature dans la bande dessinée sous le titre éloquent : « les idées reçues ont la vie dure … » ; Isabelle Bollard-Rayneau du Musée de Bavay s’entretient avec Jean-Claude Golvin et Alain Genot à propos des images de restitution archéologique et bandes dessinées historiques. Enfin, avant le catalogue des oeuvres exposées dans le cadre de l’exposition, Michel Eloy, spécialiste de l’image de l’Antiquité, montre les liens entre cinéma et bande dessinée dans leur évocation de l’Antiquité : « du 7^e au 9^e art et retour ».

Le catalogue : Bulles d’Antiquité : le monde romain dans la BD, (Id’antique) Musée archéologique du département du Nord, 2012. 144 pages très illustrées. ISBN 2-9519931-7-X [voir notice bibliographique]

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